lundi 16 janvier 2012

c'était comment ?

Lundi 9 janvier 2012. Un dernier regard vers l'olivier. TaraTari et moi repartons en mer.
Le marinero est là, sur le quai. Il me sourit, pose une question qu'il pense certainement banale.
- "Alors, l'Ampolla, c'était comment? " 
- "Bien "
question complexe,
réponse simpliste.


Comment font les gens pour raconter? Par chronologie? Par ordre d'importance? Il faut faire un tri, on ne peut tout raconter. Comment savoir si le dîner à bord du cata des Italiens était plus important que le fait que j'ai fini de repeindre en orange la fenêtre de ma chambre (enfin le hublot avant, quoi) ou encore que la fille du gérant du restaurant du club nautique à décidé de faire tout un travail à l'école sur TaraTari et moi ? Il y a-t-il un classement par genre? Les dîners d'un côté, les rencontres d'un autre côté, les flamands roses et autres canards par ici. Existe-t-il un questionnaire marketing spécial événements du quotidien pendant une escale? ce serait pratique.
- "Le hublot repeint, le dîner avec les Italiens, l'interview pour le journal de la ville, la promenade dans le Delta, et toi aussi, le coucher de soleil du 5 janvier, par là... voilà.. Amis événements, rassemblez-vous, s'il vous plaît et répondez aux questions suivantes en cochant la lettre qui vous semble la plus exacte.
1. Vous estimez votre existence dans l'aventure :
a. bien plus importante que celle des autres, il faut impérativement la raconter
b. importante: si t'as rien d'autre à dire, tu peux la raconter
c. tout le monde s'en fiche, oublie.

Souvenirs en vrac, j'en ai noté plein. Sans ordre, sans classement.. et pour respecter cette anarchie de souvenirs dans mon cahier, j'ai écrit de droite à gauche, de gauche à droite, de haut en bas, dans la marge, à l'envers et parfois aussi à l'endroit.

L'Ampolla, littéralement "bouteille" ou "ampoule" en catalan. Ici, on retient "ampoule", allusion au phare de ce petit port. C'est une drôle d'idée de nom de village ça, "l'Ampoule".

- plan de la ville -

L'Ampolla - ça rend mieux en V.O. - c'était les douze grains de raisin épluchés, c'était l'asticot du port, le petit olivier, l'accueil des pêcheurs, la venue de Joséphine, un rond point, le vent incessant, le pépin et mon roi adoré.. Mais l'Ampolla c'était aussi une multitude de petites choses. Les grands moments sont comme des cailloux que je mets dans un pot de souvenirs, et la multitude de petites choses serait quant à elle, le sable fin que je verse ensuite dans ce pot. Le sable se faufile entre les cailloux, rempli le pot, forme le tout. Impossible de hiérarchiser l'importance de chacun des grains de sable. Ils comptent tous. Et au moment de larguer les amarres, cette question "Alors c'était comment l'Ampolla?" a fait tourbillonner le sable dans ma petite tête. je crois que j'aimerais chaque petit grain de souvenirs. à part peut-être...

l'Anguille en sauce - spécialité locale. 
Il y a quelques jours, quand Joe était là, nous sommes allées naviguer. Un petit grain de sable fin que j'ai aimé. Plus que l'anguille. C'était la première nav' de l'année pour TaraTari et pour moi aussi du coup. L'idée c'était de permettre à Joséphine de naviguer un peu et puis aussi de repérer de "jour" le plan d'eau jusqu'au phare de Fangal, le long du Delta de l'Ebre.

1ère nav de l'année pour TaraTari!
Conditions de rêve : 20 noeuds pour commencer à fond les ballons et puis 10-15 noeuds, pour profiter tranquilou. Dans le jargon technique, on appelle ça "un bon moment".
Et pendant ces 7 ou 8 heures de navigation, j'ai vu Joséphine sourire comme jamais. je crois qu'elle a bien apprécié. TaraTari est un séducteur. Et pendant ce temps-là, je mettais tous mes efforts dans la préparation du repas. Au menu du dîner : poisson.

et finalement, nous avons mangé des nouilles. sans poisson.

A l'Ampolla, nous avons voulu prendre un bus et il n'y en avait pas. Nous avons fait du stop pendant 3h et nous avons fini par aller voir un truc tout moche dans le Delta. C'était triste, désert et moche. Et puis un autre jour, alors que nous étions en pleine discussion à la terrasse d'un café avec Joe, un homme est venu et m'a demandé en étant assez sûr de son coup "Tu es Capucine de Tara Tari ?" Capucine de Tara Tari, la classe.
-"j'ai lu Voiles et Voiliers, et j'ai vu sur votre blog que vous étiez à l'Ampolla, j'ai pris ma voiture, je voulais vous voir"
Il nous propose une balade dans le Delta et nous invite à déjeuner. Seule, j'aurais refusé, mais là nous sommes deux. L'homme est sympa, a une soixantaine d'années, un gros 4x4 Mercedes de la principauté d'Andorre, une grosse montre Tissot, une casquette Alinghi, et dit naviguer que sur des gros bateaux. On le croit. Superbe balade en voiture climatisée, au milieu des oiseaux et des beaux paysages. Le déjeuner a été assez étonnant. Cordiale confrontation de philosophies de navigation. Il me donne conseil sur conseil, mais des conseils inadaptés à mon aventure. J'essaie tant bien que mal de lui expliquer que ce n'est pas parce que je navigue avec peu de moyens que je ne prépare pas mes navigations. Après ce déjeuner-là, je n'ai eu qu'une hâte, celle de repartir en mer avec mon si simple compagnon TaraTari. J'ai préféré le Delta version en stop.


A l'Ampolla, il y a eu la famille de la "Casa Montero". Ils m'ont tous accueillie comme si j'étais de leur famille. Carme, Xavi, Anna, Miriam des enfants adorables qui m'ont dit qu'ils allaient essayer de réaliser leur rêve, eux aussi. Miriam qui a 12 ans m'a envoyé un message que j'ai reçu il y a deux jours et qui me touche beaucoup. En voici un extrait:
" (...) Quería comentarte  que  voy a hacer un trabajo para el instituto sobre una historia periodística y yo te he elegido a tí, me pareces un modelo ejemplar para saber que tus sueños si te esfuerzas los puedes llegar a conseguir y si no es posible, por lo menos habrás luchado con todas tus fuerzas. (...)"


Cela n'a pourtant rien à voir avec la philosophie et les rêves qui se réalisent ou pas mais il y a aussi eu un petit appareil que j'ai vraiment bien apprécié. Une boîte magique qui se trouve dans les douches de la capitainerie et qui, quand ont on appuie sur un gros bouton, déclenche un souffle d'air tiède qui permet de se sécher les mains. En me contorsionnant un petit peu, j'ai pu me sécher les cheveux. Petit confort bien agréable quand il fait -72°C dehors en exagérant presque pas trop. Je l'ai vraiment bien aimé ce petit appareil et pourtant, je suis sure que tout le monde s'en fiche.


Voilà, il y a eu de nombreux grains sable. Et le pot des souvenirs de l'Ampolla est rempli.
Comme ceux qui collectionnent les sables du monde, j'ai remis le capuchon sur mon petit étui de pellicule kodak, pour emporter avec moi un peu de tout cela... je ne raconte rien, tant pis, je ne sais pas comment faire.

Un dernier regard vers l'olivier. TaraTari et moi repartons en mer.
Le marinero est là, sur le quai. Il me sourit, pose une question qu'il pense certainement banale.
- "Alors, l'Ampolla, c'était comment? " 
- "Bien "
question simpliste,
réponse complexe.

Capucine

1 commentaire:

  1. Hola Capucine, muy buenas.

    Sólo decirte que te admiro. Que envidio tu capacidad de seguir un sueño, que te deseo todo lo mejor.

    Me he permitido abrir un hilo en mi blog www.magopepo.com en el que cuento a mis amigos tu aventura.

    Ilusionados saludos.

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